La fessée engendre-t’elle la violence ?

Suite à mon article précédent, une amie a réagi comme on pouvais s’y attendre. je comprends sa réaction, je comprends la logique qui la soutend. Elle exprime cette tendance qui refuse la fessée car elle est vue comme une violence faite à l’enfant.

Je tenais à lui répondre.

 

Le commentaire à mon article précédent :

Est-ce que tu aimes être frappé ? Un mal (la violence d’un coup) peut-il apporter un bien ? Si notre enfant nous voit taper un plus faible, n’y a-t-il pas un risque qu’il reproduise cet acte ? Quel discours cohérent pourrons-nous alors lui …tenir ? Chez nous, j’apprends à nos enfants à exprimer leurs sentiments violents par la parole et non par les gestes et j’essaie de faire pareil. Nous nous demandons pardon dans le cas contraire.

 

Ma réponse :

Non, je n’aime pas être frappé. Quand je donne une fessée à ma fille, je ne cherche pas à lui donner quelque chose qu’elle aime !

Tu appelles la fessée un « mal ». Quand tu grondes ton enfant, cherches-tu à lui faire plaisir ? Ou bien est-ce pour lui une expérience désagréable ? Pourquoi le fais-tu alors ? Peut-être ne les grondes-tu jamais ? Je crois que pour nous, êtres limités, le châtiment, la punition, sont nécessaires pour poser ces limites. La vie en société ne marche pas différemment.

Ma mère m’a donné des fessées, ce n’est pas pour autant que j’estime légitime de taper un plus faible. Au contraire, j’ai appris à respecter les plus faibles car on m’a grondé lorsque je ne suivais pas cette règle. La différence est pour moi très nette entre la fessée juste, punition de la part du parent, légitime car venant d’une autorité légitime et la violence gratuite contre un plus faible que soi.

Pour extrapoler à la société, que dirais-tu d’un état qui démissionnerais de sa mission d’autorité usant d’une violence légitime ? Penses-tu que les plus faibles seraient mieux protégés ?

Je crois qu’il s’agit d’une erreur éducative majeure de penser que la fessée juste engendre de la violence. Il me semble au contraire que plus les parents démissionnent de leur mission d’autorité, plus la société devient violente…

Ma femme et moi, nous apprenons nous aussi à nos enfants à exprimer leurs sentiments violents par la parole et non par les gestes et nous essayons d’en faire autant, dans le cas contraire nous nous demandons pardon.

Nos fessées ne sont pas l’expression de sentiments violents. Elles sont juste la punition extrème, données sans colère, quand après de nombreuses explications, remontrances, autres punitions, l’enfant cherche toujours à expérimenter ce qui se passera s’il ne respecte pas la règle… Et elles sont systématiquement suivies, non pas de demande de pardon car le geste était légitime, mais de nouvelles explications sur la nécessité de la règle.

De ce fait, elles sont très rares. Pour mon ainée de 5 ans, elles peurvent être comptées sur les doigts d’une main. Pour sa soeur de 4 ans, plus difficile, sur les doigts des 2 mains. Très rares mais très utiles : indéniablement les remontrances ont du coup plus de poids, il est beaucoup moins nécessaire de se facher ou de crier.

Ceci, à mon avis, prépare l’enfant à respecter les règles de la vie en société et même de la vie tout court. Adulte, il aura la notion de limites aura un sens, le préservant des conséquences néfastes pour lui s’il les dépassaient.

Notion qui, à mon avis, manque cruellement à ces nouvelles générations qui, certes n’ont pas reçu de fessées, mais dont la recherche de violence, l’absence de respect des règles, conduit notre société dans le mur…

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Faut-il criminaliser la fessée ?

Je retranscris ici le témoignage d’une mère de famille au sujet des fessées. Je n’aurais pas mieux exprimé mon point de vue.

« A la maison, avec ma fille, la fessée-limite, la fessée-réaction, la fessée-dernier-recours, je pratique. La fessée-défouloir, je suis contre. La fessée-culpabilité… je suis imparfaite, mais remettre en cause cette méthode éducative traditionnelle ? Non !

 

Une sanction proportionnelle

Oui, j’ose dire que je pratique la fessée-sanction avec mes trois enfants, enfin, les deux aînés, car la troisième n’a que dix neuf mois. Ceci dit, une petite tapette symbolique lorsqu’elle se tortille sur la table à langer, a l’air de bien lui faire comprendre les limites !

Au diable la langue de bois, je suis convaincue que la fessée peut être éducative. Une fessée- limite, à condition, bien sûr, de rester proportionnelle à la faute ! Je ne sors jamais mon martinet pour lyncher mes enfants de 4 et 6 ans pour un verre d’eau à terre ! Car ma fessée ne se veut pas humiliation. Je me souviens que petite, alors en classe de CP à Paris dans une vénérable institution catholique, mon camarade Blaise s’était déculotté face à la classe, pour prendre trois coups de baguette sur son petit postérieur. De ces fessées, l’on ne redoutait pas la douleur, mais surtout l’humiliation, même à six ans ! Je réprouve ces fessées-humiliation.

Une fessée pédagogique

Mais lorsque ma fille Luce, 4 ans, s’est brusquement accrochée à la jambe de Chloé, un an, au moment où je sortais cette dernière du bain, j’ai failli la lâcher… et là, une fois Chloé à terre, Luce s’est pris une bonne fessée sur ses fesses mouillées ! Une fessée-réaction à une frayeur de ma part, en effet, j’assume. Une fessée-qui-fait-mal, qu’elle n’a pas vu venir, bien sur, elle voulait jouer. Mais ça l’a marquée, et elle n’a jamais recommencé. Oui, elle a eu mal. J’appelle ça une fessée-sécurité. Celle qui part lorsque l’enfant se met lui-même ou met un autre en danger. A-t-elle compris que cela aurait pu être dangereux pour sa sœur ? J’ai tenté de le lui expliquer après, dans les pleurs et même les hurlements. Non, sur le moment, elle n’a pas voulu l’entendre. L’aurait-elle mieux compris si j’étais restée zen, comme le prônent les psy,  et lui avais expliqué le pourquoi du comment en long en large et en travers ? Peut-être. Mais pas sûr… Et lorsqu’elle me lâche la main au moment de traverser la rue pour courir devant en rigolant, que faites vous ? Elle se prend une fessée-sécurité, qui la fait hurler. Elle n’est pas contente, elle est vexée, elle a mal. C’est la fessée pédagogique. Je ne donne pas de fessée à chaque non. Je tente la douceur, la raison, la conviction, puis vient, en dernier recours alors, la menace de fessée. On la prévient, on anticipe, on compte jusqu’à trois… et elle attend cet ultimatum pour céder… ou pas. Et là, vient la fessée-dernier recours, comme attendue, comme limite qu’elle a voulu tester.

 

Mais toujours un dernier recours

Non, je ne dis pas qu’elle l’attendait, ni qu’elle y prend plaisir. Je pense qu’il faut avoir des trésors d’imagination pour mettre en place la stratégie de la douceur, et, souvent, c’est ce qui fonctionne le mieux. Il peut y avoir aussi derrière son comportement qui nous agace, un malaise à prendre en compte. Quand je sens chez elle un état d’âme, un coup de fatigue, de faim, je creuse, avant de sanctionner. Mais quand l’enfant a visiblement décidé de nous tester, la fessée-dernier-recours peut tomber. Bien sûr, je ne suis pas parfaite, il m’est arrivé de me planter.

 

Fessée-défouloir, la mauvaise fessée

La fessée-défouloir est déjà tombée alors que, après un réveil ou deux par nuit depuis un mois pour réclamer sa tétine, ou un verre d’eau, j’ai été encore réveillée à deux heures du matin par les pleurs de Luce. Elle avait trois ans. Epuisée par mon troisième accouchement récent, j’ai filé une trempe à la pauvre petite Luce, pour m’apercevoir après qu’elle était brûlante de fièvre…. La fessée-culpabilité, la pire des fessées… Celle qui vous tire des larmes tellement vous vous en voulez d’être une mauvaise mère… Eh oui, ça arrive aussi. Faut-il pour autant interdire les fessées ? Toute interdiction générale pour être appliquée, doit s’accompagner de sanction. Comment, qui, va prouver la fessée ? Vais-je voir ma Luce me faire un procès à huit ans pour la fessée reçue à trois ans par erreur ?

Par Domitille B., Maman de Luce, Chloé et Matthieu »

 

Cet article a été publié initialement ici :

http://www.grainedecurieux.fr/Graine-De-Parents/S-Eveiller-Et-Grandir/Developpement-Enfant/Pages/POUR_certaines_fessees.aspx

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Le médecin traitant : ni juge, ni procureur mais plutôt avocat de son patient.

Un malentendu persiste quand au rôle du médecin généraliste face à son patient.

On imagine souvent que le médecin est là pour contrôler la véracité des dires de celui-ci concernant sa santé. Il est évident que si on vient me voir en affirmant : « Docteur, je ne peux pas aller travailler, j’ai la jambe cassée » et que cela n’est pas confirmé par l’examen, en mon âme et conscience, je ne ferai pas d’arrêt de travail pour fracture de jambe !

Ce cas est caricatural.

Dans de nombreuses situations, les données avancées par le patient n’ont pas de caractère objectif ni même objectivable. Par exemple, certaines situations fréquentes comme les lombalgies ou les syndromes dépressif…

Or, la relation entre le médecin traitant et son patient est basée sur la confiance et l’empathie. Ceci sous-entend que le doute doit toujours bénéficier au patient afin de préserver cette relation, indispensable au soin.

De ce fait, il est illusoire de demander aux médecins traitants un rôle de contrôleur qui outrepasserait la simple déontologie qui doit prévaloir dans chacun de nos actes.

Le médecin, par vocation, par nature, par humanisme, est aux côtés, pour ne pas dire du côté de son patient.

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Education à la santé, incontournable

Ne pourrait-on voir la santé autrement et apprendre à compter autrement. L’esentiel de dépenses publiques de santé est concentré sur le soin et la prise en charge de la maladie. Force est de constater que l’ effort d’éducation à la santé des citoyens est la parente pauvre du système. Il y a peu d’espoir de voir se réduire le budget de la maladie si aucun effort de santé publique de type éducatif n’est engagé pour que les français se portent tout simplement mieux. La réduction des maladies dites de civilisation est certainement possible. La réduction de l’accès à la santé ne fera qu’aggraver l’état de santé des français et augmenter les dépenses notamment dans les maladies chroniques.

Si l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam) doit se situer en dessous de 3 %, alors que la démographie, l’augmentation de la durée de vie, l’augmentation de maladies chroniques et de dégénérescences notamment du cancer, laissent penser que la demande de soins est en croissance, on peut se demander qui paiera la note ?
Qui paiera la note ? Les usagers du système de santé, n’en doutons pas ! Les leviers sont connus : baisser les budgets des hôpitaux, augmenter les franchises et les forfaits, opérer de nouveaux déremboursements de médicaments. A chaque fois, au bout du compte, c’est l’usager qui paie. D’ailleurs, les travaux des économistes le montrent clairement, en dehors des affections de longue durée et des hospitalisations, l’assurance maladie ne rembourse plus aujourd’hui 75 % mais seulement 50 %.
Les attaques contre le système de santé solidaire se poursuivent donc, en utilisant toujours la même
variable : la baisse de la couverture d’assurance maladie. Alors que d’autres solutions existent:
– modifier l’organisation du système de santé pour le rendre plus performant,
– mobiliser des ressources nouvelles, comme le recommandent notamment les rapports successifs de la Cour des Comptes.
Nous connaissons les conséquences dans tous les pays qui ont choisi cette voie : multiplication des inégalités sociales de santé, progression de la fracture sociale, mauvais état de santé des populations, déséquilibres de santé publique.
C’est inacceptable certes, mais quelles propositions ?
Ouvrir des pistes :
1 – Repenser la santé en termes prioritaires de santé publique, au sens primaire du terme, éduquer et agir sur les modes de vie, habitudes alimentaires, habitat, transport, travail etc… le sujet est vaste dès qu’il s’agit de santé publique. Mettre en place une véritable éducation à la santé, est encore la meilleure voie pour prévenir la maladie et réduire les dépenses de santé.
2 – Changer de vision des dépenses de santé et Apprendre à compter autrement :
Voir la santé comme un capital structurel de l’Etat et non pas comme un « trou ». On ne parle pas du déficit de la défense, ( chaque soldat en Afghanistan nous coûte …), de la justice, ou de l’éducation.
Faire un vrai bilan du budget. Une grande partie du budget public de la santé retourne dans les caisses de l’Etat par la voie des prélèvements divers sur les professionnels de santé ( impots, taxes …) ou sur les établissements de santé ou industriels de la santé.
Compter autrement c’est aussi redéfinir la mission de l’assurance maladie, définir le socle de prise en charge pour tout citoyen, ou explorer la piste du principe pollueur-payeur….

Ecrit par William Michaut

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Faut-il fermer les écoles devant l’épidémie de grippe A ?

Voici ce qu’en dit l’OMS qui me semble bien montrer l’intérêt en terme de gestion de l’épidémie et le danger en termes économique et social :

Eviter de saturer les services de santé

« La fermeture préventive [des établissements scolaires] a pour principal avantage, en termes de santé, de ralentir la propagation de la flambée dans une zone donnée et donc de réduire le nombre de cas au moment du pic de la pandémie. C’est particulièrement important lorsqu’au pic de l’épidémie, le nombre de personnes dont l’état nécessite des soins médicaux menace de saturer les services de santé ou de dépasser leurs capacités. En ralentissant la propagation du virus, les fermetures d’écoles peuvent également faire gagner du temps aux pays alors qu’ils renforcent les mesures de préparation ou qu’ils s’approvisionnent en vaccins, en antiviraux, et qu’ils prévoient d’autres interventions.

Il est extrêmement important de fermer les établissements scolaires au bon moment. Les études fondées sur une modélisation semblent indiquer qu’il est préférable de fermer l’établissement tout au début de la flambée, idéalement avant que 1% de la population ne tombe malade.

Dans des conditions optimales, la fermeture des écoles peut réduire de 30% à 50% la demande de soins de santé au moment du pic de la pandémie. Cependant, si les écoles ferment trop tard au cours d’une flambée dans la collectivité, la réduction de la transmission du virus sera probablement très limitée.

Les politiques de fermeture des établissements scolaires doivent prévoir des mesures pour limiter le contact entre les élèves lorsqu’ils ne vont pas en classe. S’ils se réunissent ailleurs qu’à l’école, les élèves continueront à transmettre le virus et les bénéfices de la fermeture de l’établissement sera très faibles voire nuls. »

Coût économique et social

« Lorsqu’elles décident de prendre des mesures, les autorités sanitaires et scolaires doivent être conscientes de leur coût économique et social, qui peut être disproportionné par rapport aux bénéfices potentiels.

Le principal coût économique de la fermeture des écoles découle de l’absentéisme des parents ou des tuteurs qui doivent rester chez eux pour s’occuper de leurs enfants. Selon certaines études, la fermeture des établissements scolaires pourrait entraîner l’absence de 16% des employés à leur poste de travail, qui viendrait s’ajouter à l’absentéisme habituel et à l’absentéisme pour maladie. Cependant, ces estimations varient considérablement selon les pays en fonction de plusieurs facteurs, dont la structure de l’emploi.

Paradoxalement, si la fermeture d’une école peut réduire la demande de soins, elle peut aussi perturber la fourniture des soins essentiels car de nombreux médecins, infirmiers et infirmières ont des enfants d’âge scolaire.

Les décisions doivent aussi être prises en tenant compte de l’aspect social. En effet, le fait d’interrompre des programmes sociaux extrêmement bénéfiques en milieu scolaire, tels que la distribution de repas et de laisser les enfants chez eux sans surveillance peut être préjudiciable à la santé et au bien-être. »

Consultable ici :

http://www.who.int/csr/disease/swineflu/notes/h1n1_school_measures_20090911/fr/index.html

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La grippe A et son vaccin, un vaste complot ?

Lassé de certains propos concernant la grippe A et sa vaccination, voici la réponse que j’ai adressé à un mail diffusé largement. Ce mail comprenait principalement une suite de questions.

« En tant que simple médecin généraliste, permettez-moi de commenter certaines des questions que vous posez :

« Comment se fait-il que le brevet du vaccin contre la grippe porcine (H1N1) a été déposé en 2007 (bien avant la réapparition du virus disparu depuis la fameuse épidémie de grippe espagnole, en 1918) ? »

Le virus H1N1 n’a pas disparu en 1918, il a été « l’agent responsable de la pandémie de 1977-1978 à la mortalité relativement faible. Il a été retrouvé dans d’autres épidémies locales, comme aux États-Unis et en Espagne depuis 2007 » voir ici : http://fr.wikipedia.org/wiki/Influenzavirus_A_sous-type_H1N1#Grippe_de_1977-1978

« Pourquoi aucun média et aucun expert scientifique ne rappellent que la grippe ordinaire tue chaque année entre 250.000 et 500.000 personnes, soit plus de 1.000 morts par jour (ce sont les chiffres officiels de l’Organisation Mondiale de la Santé) ? »

Je ne sais pas si c’est le hasard, mais j’ai entendu de nombreux experts scientifiques et de nombreux médias rappeler que le virus de la grippe saisonnière avait un taux de mortalité de 1 pour mille cas en France (soit 2 à 5 mille décès par an) et donc un taux supérieur dans les pays en voie de développement. La grippe A aurait un taux de mortalité de l’ordre de 1 à 2 pour mille cas.

« Pourquoi tous les médias du monde répètent-ils quotidiennement que le virus de la grippe A H1N1 va provoquer une hécatombe de victimes, alors que les faits démontrent qu’il s’agit d’une simple grippette (moins grave que la grippe saisonnière ordinaire) qui na fait que 2.000 morts en plus de cinq mois ? La grippe ordinaire en aurait fait, pendant ce même laps de temps, 200.000 morts ! »

On ne peut pas comparer le nombre de mort de ces 6 derniers mois avec le nombre de morts sur 6 mois de la grippe saisonnière. Tout simplement car lorsqu’on parle de 6 mois de grippe saisonnière il s’agit d’une période d’épidémie. Or l’épidémie de grippe A n’est pas encore arrivée dans de nombreux pays. Vous comparez donc une pré-épidémie, avec une épidémie. On en reparle dans 6 mois !

« Pourquoi, malgré ces chiffres de morbidité et de mortalité insignifiants (2.000 au lieu de 200.000), la plupart des pays du Monde ont passé des commandes faramineuses pour des centaines de millions de doses de vaccin, et ce, dès le mois de juin 2009 ? »

Les pays qui voulait avoir suffisamment de vaccins pour leur population devait passer commande le plus tôt possible. Car de façon scandaleuse, les premiers qui ont commandé seront les premiers livrés.
Le nombre de doses commandé n’est pas faramineux. Il faut deux doses pour être vacciné car nous n’avons pas d’immunité contrairement à la grippe saisonnière. La France a commandé pour 75 % de sa population, d’autres pays pour 40 %, d’autres pour 100 %. A posteriori, certains seront capables de reprocher à la France de ne pas avoir commandé pour 100 % de sa population…

« Autrement dit, pourquoi met-on en place des mesures exceptionnelles cette année, alors que la grippe est moins virulente que les autres années ? Qu’est-ce qui, dans les faits, justifie de telles décisions alors qu’il n’y a rien d’exceptionnel ? »

On met en place des mesures exceptionnelles pour cette grippe même si elle n’est pas vraiment plus virulente que la grippe saisonnière car comme personne n’est immunisé, beaucoup de monde va l’attraper (30 à 50 %, soit en France environ 20 à 30 millions de personnes).
Or 1 pour mille cas pour la grippe saisonnière sur 4 millions de personnes atteintes en France, cela donne 4.000 décès, mais 1 pour mille cas pour cette grippe A sur 20 à 30 millions de personnes cela donne 20.000 à 30.000 décès en France.
Vous imaginez le scandale si on ne prévoit pas de vaccin alors que l’on aurait pu ?

« Pourquoi 600 neurologues britanniques ont-ils reçu, le 29 juillet 2009, une lettre confidentielle du Health Protection Agency (HPA), les invitant à être particulièrement attentifs à la future recrudescence du syndrome de Guillain Barré (maladie neurologique dégénérative gravissime déclenchée la plupart du temps par l’acte vaccinal) ? Et pourquoi cette même agence na-t-elle pas prévenu le public qui va « bénéficier » de cette campagne de vaccination ? »

Le syndrome de Guillain-Barré n’est pas dû la plupart du temps au vaccinations, même si cela fait partie des causes. Sa principale cause est une infection virale banale (50 % des cas). Voir ici : http://fr.wikipedia.org/wiki/Syndrome_de_Guillain-Barr%C3%A9#Cause

« Pourquoi ne nous dit-on pas que le vaccin contre la grippe, depuis 40 ans qu’il existe, na jamais eu d’impact positif sur l’incidence de cette maladie, au contraire ? Une étude internationale a démontré que les vaccinés attrapaient plus souvent la grippe que les non-vaccinés. »

L’expérience des consultations de médecine générale montre que les patients vaccinés contre la grippe saisonnière l’attrapent beaucoup moins que les autres.

« Pourquoi les procédures de vaccination obligatoire seront-elles confiées, non pas à des médecins, mais à des étudiants ? »

Il n’y a pas en France de vaccination obligatoire contre la grippe A.
Vous pensez vraiment qu’après 9 années de médecine, on sait mieux vacciner que lorsque l’on est étudiant en 4è ou 6è année ? Il ne s’agit pas d’une opération à cœur ouvert !

« Pourquoi aucun médecin et aucun hôpital ne pourra dispenser les vaccins eux-mêmes ? Craindraient-ils de faux certificats ? »

Dieu merci, ce ne sont pas les médecins généralistes qui auront à gérer la vaccination. Les cabinets sont déjà saturés sans ajouter ce surcroit de travail.
Dans la plupart des cas, les vaccins seront dispensés dans les hôpitaux, dans une consultation dédiée.
Personne n’a à craindre de faux certificats puisque la vaccination n’est pas obligatoire !

« Pourquoi les autorités sanitaires, censées vouloir notre bien et notre protection, autorisent-elles qu’un nouveau type de vaccin (ce sont leurs mots) soit testé directement sur des centaines de millions de cobayes (c’est-à-dire nous), sans que les protocoles normaux de Mise en Marché ne soient respectés, et sans aucune garantie d’innocuité dudit vaccin ? »

Il ne s’agit pas d’un nouveau vaccin mais d’un vaccin contre la grippe avec une souche différente.
La procédure de mise sur le marché est respectée, c’est même ce qui retarde de près d’un mois la vaccination alors que logiquement pour avoir un impact favorable il aurait été souhaitable de la commencer avant que le seuil épidémique ne soit atteint !

Comprenez-moi bien, je ne réfute aucune question, toute question est légitime.

Malheureusement, votre texte n’est pas une suite de questions mais d’affirmations.

Si sur ce que je connais, j’ai pu relever autant d’aberrations, cela ne laisse rien présager de bon sur vos autres affirmations concernant ce que je ne connais pas. Pour moi, cela discrédite l’ensemble de votre propos, malheureusement…

Je ne suis militant ni pro-vaccinal, ni anti-vaccinal mais je ne pouvais pas laisser passer cela.

Cordialement. »

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Trop d’arrêts de travail injustifiés ?

En 2008, selon le bilan des contrôles des arrêts de travail, plus de 10 % d’entre eux seraient injustifiés.

Je ne conteste pas ce chiffre. Ceci doit inévitablement faire tirer les leçons qui s’imposent aux médecins, mais aussi et surtout aux citoyens car là aussi, la responsabilité de chacun est essentielle pour le bon fonctionnement du système.

Je tiens cependant à apporter un éclairage différent.

Dans ma courte expérience de pratique médicale (globalement 6 ans et demi en hôpital et un peu plus d’un an en cabinet), j’ai vu un certain nombre de demandes d’arrêts de complaisance. Mais en fait peu, très peu. Le refus est assez simple à opposer au demandeur, aidé, il faut le dire, par l’argument du contrôle possible.

Il y a pourtant deux situations beaucoup plus fréquentes.

La durée nécessaire d’un arrêt de travail est impossible à déterminer de façon précise !

La première situation est l’impossibilité pour le médecin de fixer une durée d’arrêt de travail précise. Beaucoup imaginent que purement et simplement, à une maladie correspond une durée précise. C’est faux. La maladie, ou plutôt l’état pathologique n’est qu’un critère parmi d’autres.

Le second critère est le travail du patient. Par exemple, pour une tendinite de la cheville peu sévère, il est évident qu’un employé de bureau ne doit pas être arrêté, alors qu’un guide de haute montagne devra bénéficier d’un arrêt prolongé.

Le troisième, impossible à apprécier par le médecin est celui du ressenti du patient. Il est par définition totalement subjectif. Ainsi une sinusite peu être très invalidante pour un patient et peu gênante pour un autre, ou bien pour un même patient, certains épisodes peuvent être plus pénibles que d’autres. On se doit de tenir compte de ce vécu. Bien sûr, il est facile de leurrer le médecin.

Le quatrième est plus rare. Il s’agit des patients empêchés par leur état de santé de se rendre sur leur lieu de travail, même s’ils pourraient travailler une fois sur place. Un exemple peut-être une entorse de poignet chez un agent administratif. L’entorse peut même ne pas le gêner pour conduire, malheureusement, en cas d’accident, l’assureur peut refuser de prendre en charge les frais prétextant que le patient n’était pas en état de conduire.

Ces cas très particuliers sont les seuls auxquels le fâmeux amendement « Lefèvre » sur le télétravail lors d’arrêts maladies aurait pu s’appliquer. Il n’y avait pas de quoi en faire une loi…

Les refus d’arrêts de travail par le patient sont extrêmements fréquents !

La deuxième situation est extrêmement fréquente, en fait pluriquotidienne pour un médecin généraliste. Il s’agit d’un patient pouvant voire devant arrêter de travailler pour problème de santé et refusant cet arrêt. La plupart du temps, ce refus est motivé par la conscience professionnelle, parfois par l’angoisse de l’inactivité, trop fréquemment par la peur de représailles…

Cela ne pose pas de problème si la poursuite du travail n’aggrave pas l’état de santé. Malheureusement, il arrive que l’arrêt de travail soit véritablement nécessaire et que faute du respect de cette consigne, les complications soient néfastes à moyen voire long terme.

De mon point de vue de généraliste, il me semble évident que le nombre d’abus d’arrêts de travail est ridicule devant celui des refus d’arrêts !

Mais bien sûr ceci est plus difficilement chiffrable et peu intéressant pour faire des économies…

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La médecine peut-elle être « libérale » ?

Citez une profession libérale : « médecin ! »

En fait rien n’est moins sûr. Ce n’est actuellement pas vraiment le cas. Doit-on le regretter ? Doit-on souhaiter plus de libéralisme ou au contraire encadrer davantage l’exercice médical ?

Que serait une médecine vraiment libérale ? Liberté d’installation, liberté du mode d’exercice, liberté de choix des horaires de travail, des périodes de congé, des tarifs, etc…

On voit que sur certains points, les principes d’une profession libérale sont écornés. D’autres posent questions. Tout simplement parce que la médecine est en fait un service public et probablement le plus primordial de tous. L’état doit donc garantir l’accés au soin à tous les citoyens.

Est-il possible de concilier service public et exercice libéral ?

 

Le « marché » médical ne se conçoit que si l’offre est suffisante !

Il y a quelques décennies lorsque les médecins étaient « trop nombreux », on estimait que le marché permettrait de réguler l’offre de soin, les médecins s’installant inévitablement dans des zones où la densité médicale était moindre, s’ingéniant à offrir au patient des services les plus complets possibles et étant contraints à une disponibilité au moins égale à celle des « concurrents » pour se faire leur « clientèle ». Le grand nombre de médecin permettait que ces principes de profession libérale soient compatibles avec un service public.

Mais il existait déjà une entorse au libéralisme et de taille : les honoraires n’étaient pas libres. En fait c’était et c’est toujours le cas uniquement pour les médecins qui choisissent d’être conventionnés (c’est à dire signer la convention de la sécurité sociale), les autres pouvant toujours fixer les honoraires librement ce qui implique que les patients ne sont pas remboursés. On voit que le principe est sauf, mais dans les textes uniquement, la pratique étant que pour l’immense majorité des médecins les honoraires sont contraints par la sécurité sociale.

Du temps de l' »excés » de médecins, le système avait malgré tout des effets pervers. En effet, pour mieux gagner leur vie, les médecins étaient tenter de multiplier les actes en voyant plus que nécessaire les patients, d’où parfois un gaspillage de l’argent de la sécurité sociale.

Une nouvelle ère s’amorce, celle de la pénurie de médecins (1). Comment concilier l’exigence du service public avec celle d’une médecine libérale lorsque le « marché » a été volontairement faussé par une diminution drastique du numérus clausius ?

 

Concilier service public du soin et exercice libéral à l’heure de la pénurie

A mon avis, c’est impossible. Cette pénurie de médecins entrainera inévitablement un défaut d’accès aux soins pour une partie de la population. De plus les coups de canif au « libéralisme » médical proposés pour pallier à ce problème ne feront qu’aggraver les choses.

On peut citer par exemple l’obligation de demander une autorisation d’absence pour les médecins installés proposée dans le texte de réforme soumis au législateur en ce moment même. Cette mesure totalement anti-libérale mais parfaitement logique pour préserver la permanence des soins,  détournera encore davantage les médecins des campagnes…

Je crois que le réalisme voudrait que l’on cesse de parler de médecine libérale, qui est en fait et sera probablement de plus en plus une profession « régulée ».

Accepter de ne plus être des « libéraux » ce serait simplement ouvrir les yeux. Il est malgré tout dangereux, tant que le nombre de médecins formés est insuffisant, de multiplier les contraintes à l’installation car ces mesures ne feront qu’aggraver la situation… (2)

 

(1) http://medecindecampagne.lesdemocrates.fr/2009/03/07/penurie-de-medecins-au-dela-de-la-question-du-nombre/

(2) http://medecindecampagne.lesdemocrates.fr/2009/03/09/deserts-medicaux-ce-quil-ne-faut-pas-faire/

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Préservatif ou abstinence ? Les deux !

« Je dirais qu’on ne peut pas vaincre ce problème du sida uniquement avec de l’argent, qui est nécessaire. S’il n’y a pas l’âme, si les Africains ne s’aident pas, on ne peut le résoudre en distribuant des préservatifs. Au contraire, ils augmentent le problème. » (1) (2) (3)

Errare humanum est, perseverare diabolicum

Encore une erreur de communication de l’église catholique, ça devient lassant ! Surtout que cette fois-ci, il s’agit du pape Benoit XVI, lui-même.

Les réactions médiatiques et citoyennes qui s’en sont suivies étaient courues d’avance et compréhensibles.

Je dis erreur de communication car je pense que Benoit XVI n’aurait pas trahi sa pensée s’il avait formulé les choses ainsi :

« A l’heure actuelle, on ne peut malheureusement pas se passer d’un moyen comme le préservatif pour combattre le SIDA. Mais ce moyen n’est pas suffisant, s’il n’y a pas l’âme, si les Africains ne s’aident pas, on ne peut résoudre ce fléau et il risque de s’aggraver »

Du moins, je suppose…

Mais encore une fois, les erreurs de communication de quelques organisations humaines que ce soit ne sont pas l’objet de ce blog.

Le SIDA pose de multiples questions complexes, je ne m’attacherai qu’au problème médical et plus précisément à la prévention.

Le préservatif, seul moyen efficace contre le SIDA ?

On entend souvent : « le seul moyen efficace est le préservatif » et l’on stigmatise l’église catholique qui dit-on prone « l’abstinence ».

Permettez-moi de faire référence à l’ONUSIDA :

« Le mot ‘seulement’ ne s’applique pas au sida – que ce soit pour dire traitement seulement, prévention du VIH seulement, préservatifs seulement, abstinence seulement ou circoncision masculine seulement. En réalité, il nous faut tout, c’est-à-dire une approche réellement exhaustive. » (4)

« Les gouvernements se sont engagés à promouvoir […] l’intensification des efforts pour assurer un large éventail de programmes de prévention, notamment information, éducation et communication, visant à réduire la prise de risque et favorisant les comportements sexuels responsables, notamment l’abstinence et la fidélité ; l’accès élargi aux produits essentiels, notamment les préservatifs masculins et féminins et à du matériel d’injection stérile ; etc… » (5)

« Les préservatifs ont aidé à réduire les taux d’infection à VIH là où le sida est déjà installé, limitant une propagation plus large du virus dans des milieux dans lesquels l’épidémie reste concentrée dans des groupes spécifiques de population.

Les préservatifs ont aussi encouragé une plus grande généralisation des comportements sexuels à moindre risque.

Une étude récente sur l’épidémie de sida en Ouganda a confirmé qu’une utilisation accrue du préservatif, parallèlement à un report à un âge plus élevé du premier rapport sexuel et à une réduction du nombre de partenaires sexuels, était un facteur important de la diminution de la prévalence du VIH dans les années 90 (6).

Les efforts de la Thaïlande pour déstigmatiser les préservatifs et les promouvoir de manière ciblée auprès des professionnel(le)s du sexe et de leurs clients ont considérablement réduit les infections à VIH parmi ces groupes de population et contribué à limiter la propagation de l’épidémie à la population générale.

Au Cambodge, un politique similaire a aidé à stabiliser la prévalence nationale tout en réduisant substantiellement la prévalence parmi les professionnel(le)s du sexe.

En outre, la campagne précoce et dynamique de promotion des préservatifs auprès de la population générale et des groupes vulnérables au Brésil a contribué avec succès à lutter durablement contre l’épidémie. » (7)

Et j’aurais pu multiplier les exemples. Je me suis borné aux textes datant de moins d’un an et en français, de multiples autres plus anciens ou en anglais sont accessibles.

D’autres références sont accessibles sur le site de l’OMS rubrique SIDA qui a d’ailleurs entreprit une évaluation de l’ensemble des actions d’éducation et d’information.

Eviter les positions dogmatiques

Nous voyons qu’une fois encore, n’en déplaise aux tenants d’un dogme ou d’un autre, l’efficacité veut que l’on n’oppose pas les moyens mais que l’on comprenne qu’ils sont complémentaires.

Et pour enfoncer le clou, encore une fois, tout ceci est basé sur la transmissions de connaissances aux citoyens et principalement aux adolescents…

 

 

(1) http://zenit.org/article-20479?l=french

(2) http://www.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2368376&rubId=4078

(3) http://www.liberation.fr/societe/0101557413-preservatif-ce-que-le-pape-a-vraiment-dit

(4) Réponse à « réévaluer la prévention du VIH »

(5) http://www.unaids.org/fr/PolicyAndPractice/HumanRights/default.asp

(6) Singh S, Darroch J.E, Bankole A. A, B et C en Ouganda : le rôle de l’abstinence, de la monogamie et de l’utilisation du préservatif dans la diminution du VIH. The Alan Guttmacher Institute. Washington DC. 2003.

(7) Les préservatifs et la prévention du VIH

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Le patient, premier acteur de santé.

C’est à la fois un constat et un souhait.

Un constat : que vous le vouliez ou non, la personne qui influe le plus sur votre santé c’est vous-même. Les exemples sont aisés à trouver. L’alimentation, les conduites à risque, le tabac, le respect des consignes médicales etc… Si le patient ne se prend pas correctement en charge, personne ne peut le faire à sa place.

Le souhait est que chacun prenne conscience de  cet état de fait. Lorsque c’est le cas, tout le monde y gagne. Le patient principalement car sa santé sera mieux prise en charge. Le médecin, lui, n’a alors plus le sentiment de précher dans le désert. La collectivité dépense moins pour des soins inutiles car mal suivis ou qui auraient pu être évités si le patient s’était pris en charge.

 

Le médecin : bon papa, père fouetard ou garagiste ?

Et le rôle du médecin, me diriez-vous ?

Dieu merci, nous sortons de la médecine paternaliste où le médecin savait ce qui était bon pour le patient et où celui-ci ignorait tout. Ce qui conduisait parfois à une opposition médecin-patient, ce dernier refusant ce que le médecin finissait par lui imposer presque de force. Ou d’autre fois au « mensonge éthique », où le médecin, seul à connaître la vérité faisait ce qu’il pensait bon pour la santé du patient sans que celui-ci n’en sache rien.

Nous sortons aussi de la médecine « garagiste ». Celle-ci consistait à amener son corps au médecin et à demander à le récupérer guéri sans pour autant participer (comme on amène sa voiture à réparer). Et si le corps n’était pas bien réparé, ne restait plus qu’à accuser le médecin.

 

Le médecin, un conseiller pour les questions de santé

Nous entrons dans une ère où le médecin est un conseiller. Patient et médecin sont alors dans un rapport d’égal à égal. Le médecin par définition possède un savoir académique et expérimental sur les questions de santé. Le patient a lui aussi parfois un certain savoir sur ces questions. Il est le seul à même de faire les choix qui le concerne tant que sa capacité de jugement n’est pas altérée. Le rôle du médecin est alors d’éclairer le patient sur le choix à faire en lui donnant les informations les plus complètes possibles.

Cette démarche rend le médecin et le patient co-responsables de l’issue du traitement. Le médecin est par contre réprimandable si les informations données sont erronées ou notoirement tronquées.

Cela n’enlève rien aux autres aspects de la relation médecin-patient, en particulier la nécessaire écoute et l’empathie.

 

Tous les acteurs de santé doivent être formés et informés, le patient aussi !

Confieriez-vous votre santé à quelqu’un mal formé et mal informé ?

La conclusion est donc que si nous voulons que les patients soient bien bien soignés, il est nécessaire que tous les citoyens recoivent une formation à la santé.

Bien sûr, il ne s’agit pas que tous fassent des études de médecine ! Il serait inutile que chacun connaisse le détail du diagnostic et du traitement de toutes les maladies connues…

Simplement avoir des notions de base sur le fonctionnement de son propre corps, sur les mesures quotidiennes de prévention, sur la prise en charge des pathologies fréquentes et enfin sur les gestes de premier secours.

Ceci nous ramène à mon leitmotiv :

http://medecindecampagne.lesdemocrates.fr/2009/03/03/pour-une-education-a-la-sante/

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L’utopie de la Médecine Humaniste II

Retrouver une Médecine Humaniste. Une vraie gageure. En l’état actuel, je peux témoigner qu’il est possible de mettre le patient au centre de ses décisions. Mais cela impose de résister aux effets pervers du système.

Voici le témoignage d’un ancien médecin généraliste qui après dix ans d’exercice libéral a préféré l’abandonner pour une activité salariée. (1)

 

La technicité valorisée, l’humanisme dévalorisé

« On le sait, notre formation (hospitalière) est plus technicienne que humaniste : valorisation de l’acte technique (encore plus valorisé aujourd’hui à l’hôpital par la tarification à l’activité, renforcée par la nécessité d’amortir, de rentabiliser, et donc de faire tourner ce qu’on appelle les plateaux techniques, par le côté « sérieux » et « scientifique » de l’acte technique donnant une image d’un médecin grand docteur, grand spécialiste etc…).

Sans compter que le découpage du patient et de son corps en spécialités induit une hyperspécialisation, encourage des vocations de techniciens très pointus, qui, en fonction de leur personnalité au départ, orientent la pratique vers ce type de pensée et très peu vers une approche globale, humaine et humaniste de l’homme.

Sans compter que la psychologie est très dévalorisée aux yeux de nombre de ces médecins-élites (j’avais un chef à l’hôpital, major de l’Internat, mais très malade psychologiquement qui m’a dit un jour : « pourquoi tu parles aux malades ? Il y a des psys pour ça !!! »). »

 

Les effets pervers du système libéral

« Le système libéral (que j’ai vécu et pratiqué pendant 10 ans… qui reste encore dans ma mémoire une sale période…) a de graves effets pervers.

Premier effet pervers : Le médecin qui passe 5 min avec chaque patient , fait 60 actes par jour, passe souvent pour un bon docteur, énergique, efficace… et gagne superbement bien sa vie, tandis que celui qui passe parfois 30 à 45 min avec quelqu’un qui est en souffrance psychologique ou à lui expliquer quelques mesures de bon sens (qui seront plus efficaces qu’un médoc prescrit à la va-vite, et coûteront au final beaucoup moins à la collectivité, aussi bien à court terme qu’à long terme, puisqu’il y aura des effets pérennes) est pénalisé : il gagne moins bien sa vie, son action n’est pas reconnue ni valorisée par notre société.

Deuxième effet pervers, conséquence du premier : les médecins souffrent en définitive d’une mauvaise qualité de vie (stress, longues journées de travail… et à quoi bon gagner plein d’argent quand on n’a pas le temps de le dépenser), sont isolés, n’ont plus de temps de se former, de s’informer (je ne parle pas que du domaine professionnel), de se cultiver et pour certains, sont en grande souffrance morale. Une étude récente faite en Normandie montre que le taux de suicide est le double de celui de la population générale (même si ça n’est pas nouveau, c’est toujours inquiétant…)

Troisième effet pervers, les médecins qui ne s’accommodent pas de ce système (reconnaissance pécuniaire inversement proportionnelle au temps passé avec les patients) finissent par le fuir (comme j’ai fait moi-même) et il reste dans le système d’autres, parfois cupides, parfois mégalos, parfois prisonniers d’un système d’où ils ne savent pas comment s’échapper (il n’est pas facile de réduire son train de vie surtout quand on s’est endetté). 

Quatrième effet pervers : la seule revendication qu’ils opposent à l’assurance maladie et aux pouvoirs publics, c’est qu’on augmente le prix unitaire de leur acte pour faire reconnaître symboliquement la valeur de leur travail, ce qui augmente leurs impôts et les oblige à faire encore de la surenchère d’activité, et augmente d’avantage le niveau d’exigence des patients qui en veulent encore plus pour l’acte payé, et le niveau de mécontentement quand il y a un aléa ou une erreur médicale. »

 

L’illusion de la médecine libérale

« La plupart des médecins et des syndicats médicaux sont pourtant particulièrement attachés au paiement à l’acte, opposés à une rémunération partielle au forfait (pour certains services, dossiers de suivi…), parce qu’ils croient à l’illusion que leur exercice est encore libéral (en réalité il en a les inconvénients et plus les avantages), à leur indépendance (alors qu’on les oblige de plus en plus à rendre des comptes…)

Et ça continue de plus belle… »

(1) source : Forum des Commissions Démocrates, site ouvert aux adhérents du MoDem pour l’amélioration du projet politique. Publié avec l’accord de l’auteur, susceptible d’être modifié selon les souhaits de celui-ci.

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L’utopie de la Médecine Humaniste

Une médecine humaniste. Pléonasme diriez-vous. J’aimerais tant vous donner raison. Dans les faits nous avons trop souvent depuis quelques années une médecine capitaliste.

Je ne suis pas en train de jeter l’opprobre sur la corporation à laquelle j’appartiens, loin de là. Si comme partout les « brebis galeuses » existent, elles sont loin d’être majoritaires.

Mais le système nous entraine là où nous perdons notre âme.

 

Qu’est-ce qu’une Médecine Humaniste

Commençons par définir ce qu’humanisme signifie en médecine. L’humanisme, c’est oeuvrer pour que l’homme soit non pas un moyen mais une fin, les diverses règles étant faites pour l’homme et non l’inverse (qui serait du légalisme), l’argent étant fait pour l’homme et non l’homme pour l’argent, etc…

Une médecine humaniste est donc tout simplement une médecine centrée sur le patient ! Cela peut sembler incroyable d’avoir à le préciser, et pourtant…

Depuis Hippocrate, ce principe semblait prévaloir. Cette idée a été certainement à l’origine des remboursements des soins de santé, l’inégalité représentée par le fait de tomber malade étant un peu compensée par un accès au soin pour tous quelque soient les moyens financiers.

Oui mais, ce système est déficitaire. Il ne peut que l’être, disent certains, probablement lucides. On doit cependant éviter qu’il ne le soit trop, au point de le mettre en péril. Les contraintes budgétaires existent donc.

 

La préoccupation première : l’argent et non les patients.

Concrètement, un service hospitalier est à l’heure actuelle responsable de son budget. Celui-ci est calculé en fonction du nombre d’actes (de soin) effectués selon un barême qui attribue à chaque acte un forfait. Ce système s’appelle la tarification à l’activité (T2A). Pour éviter un déficit trop important, un service est donc tenté de faire plus d’actes rémunérateurs et de délaisser les activités qui rapportent peu (par exemple prendre du temps avec un patient pour lui apprendre ce qui concerne sa maladie). L’occupation des lits sera calculée de la même manière une seule nuit rapporte peu au service, deux nuits rapportent plus, à partir de trois nuits c’est beaucoup moins intéressant. Le service est donc tenté de faire rester une deuxième nuit chaque patient mais ensuite de « le faire sortir » le plus vite possible.

J’ai été frappé, en entrant dans la vie professionnelle initialement hospitalière, de voir que la question financière problème est le centre de la majorité des discussions entre soignants. Et ceci non pas pour augmenter leur revenus, fixes quelque soit l’activité du service, mais simplement pour que le service équilibre ses comptes autant que possible !

Pour ne pas donner l’impression à mes confrères hospitaliers que je leur jette la pierre (je ne la jette à personne d’ailleurs !), j’illustrerai aussi ce problème dans le cadre libéral. Le paiement à l’acte (qui est le pendant de la T2A hospitalière) a aussi des effets pervers. Le médecin est effectivement tenté de voir beaucoup de patients en peu de temps. L’Assurance Maladie a elle tendance à faire pression pour que moins d’actes soient effectués même si la santé du malade les justifient ! Tous les médecins libéraux connaissent quelques anecdotes sur le sujet…

Dans toutes ces situations on oublie l’essentiel : la santé du patient ! La médecine a alors perdu son âme humaniste.

Nous voyons donc aussi que tous les plaidoyers pour la rentabilité des soins, ou la gestion « comme une entreprise » sont des dérives de soumission du système de santé au marché éloignant le patient du centre des réflexions. Il ne s’agit pas d’un service comme un autre, il ne s’agit pas de commerce de voitures ni même de vendre des conseils !

 

Retrouver une médecine centrée sur le patient

Nous devons réapprendre, nous tous soignants, gestionnaires du système de soin et politiques en charge des questions de santé, à ne réfléchir que pour le bien du patient ! (Je veux dire pour ce qu’en tant que professionnel nous savons être son bien et non pas pour ce que le patient imagine ou souhaite…) Cela ne signifie pas oublier les problèmes d’argent ! Mais les relativiser, faire toutes les économies possibles qui n’entravent pas la qualité du soin. Cela ne signifie pas non plus se tuer à la tâche, car morts nous ne rendrons plus service à personne.

Il s’agit simplement de retrouver une Médecine Humaniste.

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Les bénéficiaires de la CMU pas assez ou trop soignés ?

« Les médecins refusent de soigner les patients bénéficiant de la CMU » entend-on dire. Cette affirmation indigne et étonne. En tant que médecin généraliste, elle me surprend encore plus.

Mon expérience de prise en charge de ces patients ne m’a jamais enclin à leur refuser des soins. Paradoxalement, je dirais même que la tentation serait de trop leur en accorder…

 

Les patients bénéficiant de la CMU consomment trop de soin ?

On disait peu après la mise en place de la CMU, que c’étaient ces patients qui coûtaient le plus cher en terme de dépenses de santé. « C’est parce qu’il n’avancent pas l’argent » disaient les gens de droite. « Ce sont les plus malades à cause de leur pauvreté » affirmaient ceux de gauche. Encore une fois la réalité est probablement entre les deux… Et les médecins ont une part de responsabilité.

J’aimerais vous partager deux observations issues de mon expérience de remplaçant.

La première : les patients bénéficiant de la CMU consultent trop. J’exagère évidemment, on ne peut pas généraliser. Cependant, on peut noter de nombreuses consultations peu justifiées. Comme beaucoup de mes confrères suite à cette observation, je me suis dis : « Ils abusent ! Ils profitent du système, des médecins, des soins gratuits, etc… »

Au fil du temps, j’ai compris que le problème était autre. Un certain nombre de ces patients ont très peu d’instruction et de ce fait, comprennent mal ce qui concerne leur santé. Au moindre doute, ils consultent, surtout si cela concerne leurs enfants.

Il y a aussi une question culturelle : nos vieux paysans béarnais, cévenols ou picards, souvent pauvres, parfois peu instruits ont gardé l’habitude de leurs parents de n’appeler le médecin qu’à la dernière extrémité, parfois trop tard quand le tableau, compliqué, entrainera des dépenses plus élevées et des conséquences plus graves que s’il avait été pris plus tôt. D’autres franges de la population bénéficiant de la CMU, culturellement ont le réflexe consultation à la moindre égratignure.

Ces consultations « abusives » ont malgré tout l’avantage de suivre de plus près une population à risque et d’insister sur les mesures préventives…

Dois-je en profiter pour insister sur l’idée qu’une éducation à la santé pour tous serait un facteur d’économie tout en permettant une meilleure prévention et une prise en charge améliorée ? (1)

La deuxième observation n’est pas glorieuse pour les médecins. Lorsqu’un patient consulte pour lui et deux de ses enfants, que la troisième consultation n’a pris que 3 minutes, s’il fait l’avance des frais on aura tendance à lui en faire grâce, s’il est à la CMU, on sera tenté de se faire payer trois actes (ce qui est parfaitement légal, voire normal, du fait du principe de la rémunération à l’acte). C’est aussi une des causes du surcroit de dépenses de santé par ces patients !

Ce dernier point explique mon étonnement quant aux refus de soins évoqués dans les médias. Le tiers payant offert par la CMU est tellement plus confortable pour le praticien ! Pas de question d’argent avec le patient, chaque acte est facilement encaissé. La carte vitale passée, plus rien à faire, pas de chèque à envoyer, un virement automatique…

 

Les médecins refusent de soigner ces patients ?

Comment alors expliquer, le refus par certains praticiens ?

Pendant une période, il semblerait que les virements de la part de la sécurité sociale tardaient un peu ou beaucoup, voire que certain étaient oubliés… Les professionnels victimes de ces dysfonctionnements ont alors pris en otage les patients concernés pour régler leurs comptes avec l’assurance maladie. Procédé logique mais choquant.

Un autre élément d’explication serait que certains médecins estiment que ces patients pauvres sont pénibles à soigner préférant des clients bien de leur personne. Dieu merci, je crois que cet état d’esprit honteux est exceptionnel.

Le dernier élément d’explication concerne les spécialistes pratiquant des dépassements d’honoraires et les dentistes dont certains soins ne sont pas pris en charge par la CMU. Là se situe probablement le plus gros problème. J’ai un a priori sur la question que je relativise n’étant pas à la place de ces confrères.

Le 5 mars dernier, les députés ont adopté une disposition permettant le testing d’un professionnel de santé préalablement signalé par un patient s’estimant victime de ce genre de discrimination (2). La méthode ne plait pas à tous. Cependant ceux qui n’ont pas ce genre de comportement ne risquent rien.

(1)http://medecindecampagne.lesdemocrates.fr/2009/03/03/pour-une-education-a-la-sante/

(2)http://www.liberation.fr/societe/0101473009-refus-de-soins-le-testing-aupres-des-medecins-possible

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Excommunications pour avortement chez une fillette : des hommes d’église ignorants !

Une décision choquante

Jeudi 5 mars, au Brésil, la mère d’une fillette de 9 ans ayant avorté de jumeaux suite à un viol par son beau-père a été excommuniée par Mgr José Cardoso Sobrinho, archevêque de Recife. Les médecins ayant pratiqué l’avortement auraient subi la même sentence. Cette décision a été approuvée par le cardinal Giovanni Battista Re, préfet de la Congrégation pour les évêques, président de la Commission pontificale pour l’Amérique latine en ces termes : « C’est un triste cas, mais le vrai problème est que les jumeaux conçus étaient deux personnes innocentes, qui avaient le droit de vivre et qui ne pouvaient pas être supprimées ». (1)

Ce qui est choquant c’est l’expression d’une condamnation publique où on aurait attendu de la part d’Humanistes Chrétiens avant tout de la compassion. D’autant que cette condamnation ne s’exprime pas avec la même vivacité à l’égard du violeur.

Ces hommes d’église font certainement là une erreur dans le témoignage de la foi qu’il sont censés porter doublé d’une erreur de communication, mais ce n’est pas l’objet de ce blog.

Je m’attacherai à ce qui relève probablement d’une méconnaissance médicale.

 

Un risque pour la mère et donc pour les foetus 

« Les jumeaux conçus étaient deux personnes innocentes, qui avaient le droit de vivre » disait Mgr Giovanni Battista Re. Or du fait du double risque représenté par la grossesse gémellaire et l’extrême jeune âge de la fillette sans doute l’aboutissement de cette grossesse aurait été non seulement la mort des foetus mais aussi celle de leur mère.

C’est à ce titre que l’équipe médicale est intervenue dans un pays où le « droit à l’avortement » n’existe pas, devant faire un choix entre la vie de la jeune fille et le risque de « pas de vie du tout ».

Cela rappelle une situation bien plus fréquente, celle des grossesses extra-utérines. L’embryon est conçu, il peut être toujours vivant, parfois à l’échographie on voit son coeur battre et si l’on n’intervient pas pour arrêter cette vie, l’évolution de la grossesse à de très forts risques d’aboutir au décès de la mère et du foetus. De tels actes sont pratiqués presque quotidiennement dans toutes les maternités du monde.

L’Eglise catholique condamnerait-elle alors aussi les médecins et les femmes intervenant dans cette situation ? Si ces hommes d’église avaient davantage manifesté l’Amour du Christ qu’une volonté de lapider les pêcheurs, cela aurait évité certaines réactions de révolte. En particulier celle de professionnels pour qui les propos tenus témoignent d’une criante ignorance.

(1)sources :

http://www.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2367161&rubId=4078,

http://www.lexpress.fr/actualite/societe/bresil-un-archeveque-excommunie-la-mere-d-une-fillette-violee_745569.html,

http://www.lefigaro.fr/international/2009/03/09/01003-20090309ARTFIG00488-l-avortement-d-une-fillette-de-9-ans-bouleverse-le-bresil-.php.

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Déserts médicaux, ce qu’il ne faut pas faire.

Il est trop tard. Le volontarisme ne pourra rien y faire. Pire, il risquerait d’aggraver les choses.

Lors de la discussion de la loi Hôpital Patients Santé Territoire, les députés ont voté la semaine dernière :
1. Une taxe pour les généralistes exerçant en zones surdotées, avec remise en cause de la liberté d’installation annoncée aux étudiants
2. Une remise en cause du volontariat pour la participation à la permanence des soins (gardes)
3. Une autorisation d’absence pour les médecins installés à formuler auprès du Directeur de l’Agence Régionale de Santé,
4. Une taxe sur la télétransmission (des feuilles de soins électronique générées grâce à la carte vitale pour le remboursement des patients) pour les médecins installés,
5. Le contrôle des cabinets médicaux par l’Inspection Générale des Affaires Sociales.

D’autres mesures pour éviter les déserts médicaux n’ont pas été retenues :

  • Obliger les jeunes médecins à exercer une ou plusieurs années dans un lieu imposé (comme pour les jeunes enseignants)
  • Reprendre le système d’implantation des pharmacies limitées en nombre en fonction du nombre d’habitants.

Je ne dis pas que ces mesures seraient illogiques, je ne dis pas non plus qu’elles seraient injustes, je dis simplement qu’elles ne feraient (feront) qu’aggraver les choses.

Pourquoi ? Avant tous parce qu’avec une thèse de médecine générale, les modes d’exercice sont multiples. Je ne citerais que quelques exemples : activité libérale « particulière » (homéopathie, acupuncture, ostéopathie…), postes hospitaliers (urgences, médecine polyvalente, gériatrie, psychiatrie…), médecin coordonnateur de maison de retraite, médecine scolaire, médecin de PMI, médecin conseil de la Sécurité Sociale, médecin conseil pour société d’assurance, industrie pharmaceutique etc… Les offres d’emploi sont légion, dans chaque secteur mentionné de nombreux postes ne sont pas pourvus et ce phénomène va s’accentuer avec les départs à la retraite.

On remarque déjà, dans l’état actuel des choses que de plus en plus de jeunes généralistes se détournent de l’exercice libéral. Il est à noter qu’il ne s’agit pas d’une question financière car les médecins installés gagnent mieux leur vie que les autres ! Il s’agit du choix de lieu d’exercice et de la volonté de se préserver d’une vie professionnelle laissant peu de place à la vie personnelle.

Aucune mesure coercitives à l’égard des médecins libéraux n’empêchera les jeunes de choisir un autre mode d’exercice, aucune ne les contraindra à exercer là où ils ne veulent pas.

De plus, chaque contrainte supplémentaire à l’égard des médecins installés accentuera ce phénomène…

Il est trop tard, les déserts médicaux sont malheureusement inéluctables jusqu’à l’arrivée d’une nouvelle génération formée en nombre suffisant.

Le scandale que représentera l’impossibilité d’accès aux soins d’une partie de la population aurait pu être évité si nos dirigeants avaient écouté ne serait-ce que les associations d’étudiants en médecine qui pointaient du doigt ce danger il y a plus de 15 ans… Et maintenant que ces données sont connues, c’est un comble que les élus prennent  des mesures aggravant la tendance !

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Pénurie de médecins, au delà de la question du nombre.

Qui n’a pas entendu parler du problème de la démographie médicale. Une future « pénurie de médecins » dit-on parfois. Pourtant si la question du nombre de médecins se pose, ce phénomène sera amplifié par les modifications de la pratique médicale.

Il y a 30 ans lorsqu’il y avait 1 médecin pour 1000 habitants, mon père était généraliste en campagne. Il était disponible 24 heures sur 24, il était réveillé toutes les nuits pour des visites. Il s’était associé, ce qui lui permettait de prendre un dimanche de repos tous les 15 jours…
Mon père n’était pas malheureux, il adorait cet exercice. Ma mère jouait les secrétaires en parallèle avec son rôle de femme au foyer. C’était exigeant mais elle aimait ça.
Ce n’était pas un cas à part à l’époque, tous les médecins travaillaient ainsi.
Le point noir là-dedans, c’est que ma soeur et moi n’avons aucun souvenir de notre père pendant tout son exercice libéral…

Ce type d’exercice, je le connais pour le pratiquer régulièrement en remplacement. Pendant des périodes de 2 semaines, je remplace un généraliste travaillant « à l’ancienne ». Je vois des patients de 8 h à 23 h avec juste 10 minutes pour manger, je reste joignable toute la nuit, je travaille les samedis entiers et dimanches. Ces semaines de remplacements sont fatiguantes mais exaltantes. Inutile de vous dire que je ne vois pas mes enfants pendant ces remplacements.

Jamais une fois installé je ne travaillerai comme ça. Je ne rêve pas des 35 h, mais j’espère trouver un mode d’exercice raisonnable qui me permette d’être suffisamment présent pour ma famille.

Tous les jeunes médecins que je connais sont de cet avis.

Il faut ajouter à cela une donnée majeure : la féminisation massive de la profession. Pour donner des chiffres : dans ma promo (sortie de 6è année en 2004) il y avait 50 % de filles, dans les promotions actuelles, il y a je crois environ 75 % de filles…

Faut-il préciser que les femmes travaillent moins sur une carrière que les hommes : moins d’heures pour pouvoir favoriser la vie de famille, plus de mi-temps, congés pour grossesse, plus d’abandon d’exercice. 40 % de temps travaillé en moins selon certaines études.

On dit aussi (je n’ai pas vérifié cette information) qu’il y a 30 ans les patients consultaient moins fréquemment (à tort ou à raison ?).

Enfin les médecins à l’époque étaient mieux répartis sur le territoire. Mais encore une fois, on ne peut pas reprocher aux jeunes médecins de ne pas vouloir s’installer dans les zones où l’état retire la poste, la gendarmerie et l’école…

Pour ces raisons on peut comprendre qu’un médecin pour 1000 habitants était suffisant il y a 30 ans et qu’un médecin pour 340 aujourd’hui peut faire craindre une pénurie, particulièrement dans certaines régions…

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Médecins généralistes par défaut ?

Sortant à peine de la formation médicale initiale, j’aimerais vous faire part de certaines réflexions concrêtes, sans autres prétentions.
L’idée globale qui m’est restée de ces études est comme d’autres le disent qu’en France, les médecins généralistes sont formés par défaut.

La récente généralisation du concours de l’internat (épreuves nationales classantes) à tous les étudiants a amoindri parmi ceux-ci l’idée qu’on devient généraliste parce qu’on a échoué, sans pour autant modifier totalement la donne.

Prenons les études dans l’ordre chronologique.

Première année de médecine

J’approuve le système de sélection en début d’étude. Ce système est certes contestable mais il a de gros avantages en l’état actuel. Il permet de sélectionner des étudiants capables de suivre le reste du cursus convenablement. Il évite la perte de temps, d’énergie, d’argent constatées dans d’autres pays (Espagne) où après 6 ans d’études acharnées, seul un petit nombre accèderont à la profession.
On pourrait envisager une sélection avant l’entrée en faculté de médecine. Celle-ci risquerait cependant de moins bien sélectionner les étudiants capables d’affronter la suite des études. De plus le système de la première année, permet d’ingurgiter une somme de connaissance utile pour la suite. Cela reste dommageable pour ceux qui échouent, mais moins qu’on ne le pense, ayant été dans une ambiance de travail intense pendant un ou deux ans, leur réussite dans d’autres filières semble supérieure à la moyenne. Il serait bon évidemment de développer les passerelles avec ces filières.

Le gros point noir du système de sélection est l’absence de prise en compte des qualités humaines pour accéder aux études médicales. Une idée à développer serait un stage au sein d’une ONG (en France ou à l’étranger) avant la sélection de la première année. Cela serait une contribution à la solidarité et servirait aussi d’évaluation en situation.

Je ne reviens pas sur le problème du numerus clausus, de la démographie médicale. Je soulignerais simplement le scandale représenté par les augmentations brutales de ce numerus. Des amis de 1ère année ont « loupé » le concours à quelques places et auraient été largement pris l’année suivante avec les mêmes résultats…

Deuxième et troisième années

Les 2è et 3è années constituent une même entité : poursuite des matières fondamentales, application à la santé.

Il est un point auquel j’aimerais rendre hommage : l’imprégnation dans le monde de la pratique médicale dès l’entrée en 2è année. Le stage infirmier d’1 mois dès le premier jour, les stages de « sémiologie » à raison de 2 à 3 demi-journées par semaine en 2è-3è année, la présence à l’hopital tous les matins de la 3è à la 6è année. Je plains les étudiants allemands qui doivent attendre la 6è année pour approcher le premier patient.

Les défauts des 2è-3è années sont surtout les détails inutiles pour la pratique de certaines matières fondamentales. Je pense en particulier à la biochimie, à la bactériologie (j’avais dû apprendre par coeur toutes les caractéristiques enzymatiques de chaque bactérie…)

Quatrième, cinquième et sixième années

Enfin viennent les 4è-5è-6è années où l’on apprend la pathologie. Le principe n’est pas mauvais, la mise en œuvre presque catastrophique. En effet l’enseignement est fait pour chaque pathologie par le spécialiste de la question ce qui ne semble pas illogique. Le problème c’est que chaque spécialiste estime que nous devrions en savoir autant que lui. Ce qui devrait être une véritable formation de généraliste, à savoir répondre à la question : quand je suis face à ce patient en cabinet, que dois-je faire ? se transforme en formation de multispécialiste. On a ainsi essayé de nous contraindre à retenir les doses nécessaires pour chaque type de radiothérapie, les 1000 et 1 protocoles de chimiothérapie etc…

Ceci est purement contre productif. Il est impossible à un esprit humain de retenir un tel niveau de détail sur un programme aussi vaste. Il ne sera nécessaire à aucun médecin de connaitre ces détails dans toutes les spécialités.

Le bilan ? On finit le tronc commun avec des détails plein la tête mais sans avoir les idées claires pour la pratique courante.

Internat de médecine générale

Là commence l’internat, de médecine générale en ce qui me concerne. Et l’on se dit : « chouette, pendant ces 3 ans, outre la pratique passionnante à raison d’environ 70 à 80 heures par semaine, on va avoir des cours théoriques par des généralistes qui vont bien mettre les choses au point pour une pratique quotidienne en cabinet ».

Quelle désillusion… Les généralistes en question, de la meilleure volonté du monde, estiment qu’on en sait autant qu’eux sur les questions de pathologie et refusent de nous en parler. Ils préfèrent d’autres sujets que croient-ils nous n’avons jamais abordés (alors que nous avons eu des dizaines d’heures…) concernant la relation médecin-malade, la politique de santé etc… Ces sujets sont éminemment passionnants mais concrêtement, ce n’est pas ce qui nous pose le plus problème au jour le jour.

Quand ces généralistes enseignants pensent que les étudiants en savent autant qu’eux sur la pathologie, ils ont tort, ils en savent plus qu’eux. Mais ils le savent mal, parasité par trop de détails et inapplicable concrêtement. Pour avoir une bonne formation en médecine générale nous souhaitions deux choses : qu’ils reprennent les recommandations ou consensus ou autres références et qu’ils nous expliquent selon leur expérience comment les appliquer concrêtement dans le contexte du cabinet.

En conclusion

Il serait très important de revoir cette formation pas tant sur le fond, ni même la forme mais sur sa réalisation concrête pour permettre une adéquation à la pratique future en médecine générale. Cette formation pourrait se faire dans le cadre de l’enseignement de la pathologie en faisant intervenir conjointement ou parallèlement un spécialiste et un généraliste.
Les cours théoriques de l’internat de médecine générale serviraient alors à nous préparer effectivement pour tout ce qui ne concerne pas la pathologie.
Les spécialistes quant à eux serait ainsi formés d’abord à la médecine générale puis pendant leur internat approfondirait leur spécialité, ce qui semble simplement logique.

Ainsi, les généralistes ne seraient plus formés par défaut, le choix pour la médecine générale ne serait plus synonyme d’échec, la pratique de cette médecine gagnerait en compétence et en reconnaissance.

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Pour une éducation à la santé

Après observation du système de santé français de l’intérieur pendant de nombreuses années, tant au niveau hospitalier qu’au niveau libéral, il me semble évident que la première mesure à adopter devrait être de promouvoir une éducation à la santé.

 

Une mauvaise utilisation du système de soin par ignorance

En effet, je constate tous les jours la mauvaise utilisation de notre excellent système de soins par les patients rarement par mauvaise volonté, le plus souvent et de loin par ignorance.
Une ignorance du rôle de divers acteurs de soins (en particulier urgences, généraliste, spécialistes, centre 15) mais surtout un manque de connaissances de base du corps humain, des pathologies courantes, des situations graves et/ou urgentes.

Je vous donnerais juste quelques exemples parmi de nombreuses situations possibles.
Au sujet de la santé des enfants, tout le monde devrait savoir qu’une température de plus de 38 chez un enfant de moins de 3 mois nécessite une hospitalisation de principe, que la même température chez un enfant de plus de 3 mois se traite par du Paracétamol et qu’il est inutile de consulter avant 24 h sauf si l’enfant est totalement prostré.
Tout le monde pourrait aussi savoir qu’une toux avec une fièvre ne dépassant pas 38,5°, un nez qui coule est à coup sûr une bronchite, toujours virale, qu’il n’existe aucun médicament permettant de la guérir, que l’on ne prescrit des antbiotiques qu’aux patients ayant un terrain fragilisé.
Toute douleur thoracique doit entrainer l’appel du centre 15 par le patient.

Vous voyez déjà qu’en quelques lignes les idées peuvent être claires sur des situations courantes pour une prise en charge idéale.

Si ne serait-ce que ces principes avaient été connus des patients que j’ai vu au cours des mois de décembre et janvier dernier, j’aurais eu environ 40 % de consultation de médecine générale en moins.

 

Mettre en place une éducation à la santé

Je proposerais donc qu’une dizaine d’heure d’une telle éducation soit mise en place au collège en cours de sciences naturelles avec un manuel bien fait. On pourrait y ajouter les gestes d’urgences que tout le monde devrait connaitre mais aussi les principes nécessaires pour prendre soin d’un enfant (on a des notices très détaillées pour la moindre bouilloire électrique mais on pense encore que s’occuper d’un enfant est inné…)

Ceci permettrait à mon avis une amélioration de la prise en charge de la santé de chacun avec parallèlement des économies de santé…

Il s’agirait pour moi d’une application au domaine de la santé de la prise de conscience et de la responsabilisation de chaque citoyen inhérentes à l’idéal de démocratie.

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