Citez une profession libérale : « médecin ! »
En fait rien n’est moins sûr. Ce n’est actuellement pas vraiment le cas. Doit-on le regretter ? Doit-on souhaiter plus de libéralisme ou au contraire encadrer davantage l’exercice médical ?
Que serait une médecine vraiment libérale ? Liberté d’installation, liberté du mode d’exercice, liberté de choix des horaires de travail, des périodes de congé, des tarifs, etc…
On voit que sur certains points, les principes d’une profession libérale sont écornés. D’autres posent questions. Tout simplement parce que la médecine est en fait un service public et probablement le plus primordial de tous. L’état doit donc garantir l’accés au soin à tous les citoyens.
Est-il possible de concilier service public et exercice libéral ?
Le « marché » médical ne se conçoit que si l’offre est suffisante !
Il y a quelques décennies lorsque les médecins étaient « trop nombreux », on estimait que le marché permettrait de réguler l’offre de soin, les médecins s’installant inévitablement dans des zones où la densité médicale était moindre, s’ingéniant à offrir au patient des services les plus complets possibles et étant contraints à une disponibilité au moins égale à celle des « concurrents » pour se faire leur « clientèle ». Le grand nombre de médecin permettait que ces principes de profession libérale soient compatibles avec un service public.
Mais il existait déjà une entorse au libéralisme et de taille : les honoraires n’étaient pas libres. En fait c’était et c’est toujours le cas uniquement pour les médecins qui choisissent d’être conventionnés (c’est à dire signer la convention de la sécurité sociale), les autres pouvant toujours fixer les honoraires librement ce qui implique que les patients ne sont pas remboursés. On voit que le principe est sauf, mais dans les textes uniquement, la pratique étant que pour l’immense majorité des médecins les honoraires sont contraints par la sécurité sociale.
Du temps de l' »excés » de médecins, le système avait malgré tout des effets pervers. En effet, pour mieux gagner leur vie, les médecins étaient tenter de multiplier les actes en voyant plus que nécessaire les patients, d’où parfois un gaspillage de l’argent de la sécurité sociale.
Une nouvelle ère s’amorce, celle de la pénurie de médecins (1). Comment concilier l’exigence du service public avec celle d’une médecine libérale lorsque le « marché » a été volontairement faussé par une diminution drastique du numérus clausius ?
Concilier service public du soin et exercice libéral à l’heure de la pénurie
A mon avis, c’est impossible. Cette pénurie de médecins entrainera inévitablement un défaut d’accès aux soins pour une partie de la population. De plus les coups de canif au « libéralisme » médical proposés pour pallier à ce problème ne feront qu’aggraver les choses.
On peut citer par exemple l’obligation de demander une autorisation d’absence pour les médecins installés proposée dans le texte de réforme soumis au législateur en ce moment même. Cette mesure totalement anti-libérale mais parfaitement logique pour préserver la permanence des soins, détournera encore davantage les médecins des campagnes…
Je crois que le réalisme voudrait que l’on cesse de parler de médecine libérale, qui est en fait et sera probablement de plus en plus une profession « régulée ».
Accepter de ne plus être des « libéraux » ce serait simplement ouvrir les yeux. Il est malgré tout dangereux, tant que le nombre de médecins formés est insuffisant, de multiplier les contraintes à l’installation car ces mesures ne feront qu’aggraver la situation… (2)
(2) http://medecindecampagne.lesdemocrates.fr/2009/03/09/deserts-medicaux-ce-quil-ne-faut-pas-faire/
Un avis d’une humble consoeur médecin généraliste remplaçante.
A propos de la liberté d’installation, on oublie systématiquement dans les médias, que nul (et surtout pas les futurs installés) n’est informé des soi-disant déserts médicaux. Nul non plus ne sait comment vont évoluer les paysages de généralistes et spécialistes sur le territoire français, pour la bonne raison qu’aucun diagnostic précis n’est fait.
De fait, je sais bien qu’autour de moi, nombre médecins vont partir à la retraite, et cherchent un suppléant et successeur dans le vide. Les internes qui, eux, sortent à peine de la fac (et y ont encore un pied, souvent), cherchent ici et là, mais sans trop se fouler, parce qu’il y a pléthore de demandes juste à côté de chez eux, de la fac, des hôpitaux où ils ont déjà un réseau…
Outre des incitations éventuelles (dont j’entends parler, mais que je ne me suis JAMAIS vues proposer), il nous faudrait en premier lieu, une information précise et mise à jour sur les zones sinistrées ou en passe de le devenir.
Car il est bien évident qu’obliger un médecin à se réinstaller est illusoire, que l’obliger à faire 60 km pendant la nuit pour faire une garde (quand il est dans une grande ville et qu’il voudrait « délester » ses confrères ruraux) est délétère pour tout le monde, et que les premiers concernés par le danger de la loi HSPT sont les nouveaux arrivants, ceux qui ont eu les contraintes les plus fortes du numerus clausus, et les moins nombreux des générations.
Qu’au moins, quand ils sont motivés, ils aient un semblant de choix ! Et qu’on ne vienne pas m’obliger à exercer à un tel lieu ou un autre. C’est déjà bien suffisant de trouver un compromis avec mon compagnon, qui lui aussi a le droit de travailler (non ??).
Le libéralisme de notre profession me semble, par ailleurs, limitée au temps consacré à chaque patient, ainsi que tu le dis, et à la liberté d’horaires qu’on se donne….
Merci en tous cas, cher confrère, pour ta réflexion solide et argumentée, sur des sujets qui souvent me tiennent à coeur, à moi aussi (étrange ?).
Merci pour ton commentaire.
Tu as raison, la non-information des jeunes médecins au sujet de la démographie médicale est choquante.
Un rapport très détaillé sur la situation actuelle et surtout sur l’évolution envisageable a été publié en février dernier :
http://www.sante.gouv.fr/drees/etude-resultat/er-pdf/er679.pdf
Il est très intéressant. Il montre en particulier deux choses.
Premièrement que la moindre mesure coercitive à l’installation ne fera qu’augmenter le problème en accentuant la fuite des médecins vers l’exercice salarié.
Deuxièmement que les régions actuellement surdotés en médecins sont les futures régions de déserts médicaux de demain car la population augmentera beaucoup plus rapidement dans ces régions que dans les autres alors que le nombre de médecins diminuera là aussi…
On n’a malheureusement pas l’impression que le ministère se soit inspiré des résultats de ce rapport dans la loi HSPT…
J’aborde le sujet des déserts médicaux ici :
http://medecindecampagne.lesdemocrates.fr/2009/03/09/deserts-medicaux-ce-quil-ne-faut-pas-faire/
« Usager » des médecins, je me demande s’il ne serait pas possible pour l’Ordre qui vous encadre de proposer :
– un site décrivant le nombre de médecins selon les cantons, quartiers ou autre découpage adapté
– une « bourse » des localités désireuses de recevoir un cabinet médical
– une anonce de départ souhaité par des profesionnels à la veille de leur retraite
-… d’autres informations qui vous sembleraient intéressantes…
Mais aussi remettre le numerus clausus à l’envers :
espèrer pour « tant » de population, une possibilité de « tant » de médecins selon les spécialités…
Mamouchka.
Et bien, voilà un exemple concret : nous venons de construire une maison médicale en milieu rural (à Cazals dans le Lot, limitrophe avec le Périgord). Cette maison comprend les cabinets pour 3 généralistes, 1 cabinet dentaire, 1 cabinet d’infirmières libérales et un SIAD.
Et nous n’arrivons pas à trouver le 3ème médecin généraliste qui nous manque.
Les conditions sont pourtant idéales : cadre de vie super sympa, tous services sur place (écoles, crèche, commerces etc), villes à 20 km, conditions d’exercice plus que correctes, gardes légères…
Nous ne sommes pas en pénurie de médecins ni dans l’urgence puisque nous avons deux praticiens encore « jeunes » (cinquantaine) mais voilà seuls des médecins roumains répondent à nos annonces…
Le législateur a même prévu un allègement d’impôts pendant plusieurs années pour un jeune qui s’installerait. Rien n’y fait.
Si vous connaissez quelqu’un, n’hésitez surtout pas à nous l’envoyer (ccsb46 arobase wanadoo.fr)
SUR le plan juridique nous ne sommes pas des libéraux car nous sommes payés par la ss et dans le var il y a une mentalité particulière :le médecin pour la majorité est un « service à domicile »et il faut lutter (pour ma part en tous cas) pour les faire venir au cabinet mais je crois qu’après 15 ans d’ installation je suis lasse de la politique gouvernementale qui a dénigré le généraliste qui voit arriver dans son cabinet les articles internet qu’il doit commenter aux patients presque en devant se justifier d’être un professionnel car pour cetains patient c’est l’article qui fait référence